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Le devoir de mise en garde de la caution (Explications)

Le cautionnement est défini par l'article 2288 du Code civil comme « le contrat par lequel une caution s'oblige envers le créancier à payer la dette du débiteur en cas de défaillance de celui-ci. »

Exemple : une société contracte un emprunt bancaire pour financer des investissements. Le dirigeant se porte caution de la société auprès de la banque. Du fait du cautionnement, si la société ne paie pas les échéances en temps et en heure, la banque pourra en réclamer le paiement directement auprès du dirigeant du fait de sa qualité de caution.

Compte tenu des conséquences importantes attachées à l’engagement de caution, ce dernier, pour être efficace, doit répondre à plusieurs exigences.

Notamment, lorsque le créancier est un créancier professionnel (en d’autres termes, une banque), ce dernier est astreint à un devoir de mise en garde de la caution.

Ce devoir de mise en garde consiste en une obligation, pour la banque prêteuse, d’avertir la caution du risque que le cautionnement fait courir sur son patrimoine du fait de la nature de cet engagement.

Ce devoir de mise en garde a été créé par la jurisprudence de la Cour de cassation puis entériné par la loi, qui y a apporté quelques modifications.

Les règles qui s’appliquent à un engagement de caution dépendent de la date à laquelle cet engagement a été consenti.

Dès lors, coexistent deux régimes du devoir de mise en garde qu’il convient de détailler, étant précisé que les sanctions prononcées à l’égard d’une banque qui aurait manqué à son obligation sont en revanche similaires.

Engagements de caution consentis avant le 1er janvier 2022

L'article 2299 du Code civil n'est pas applicable aux engagements de caution consentis avant le 1er janvier 2022.

Pour apprécier le respect de l’obligation de mise en garde dans le cadre des cautionnement consentis avant cette date, il convient donc de se référer aux règles jurisprudentielles.

Selon ces dernières, le créancier professionnel a une obligation de mise en garde de la caution dans deux hypothèses :

  • L'engagement du débiteur principal apparaît inadapté à ses capacités financières ou,
  • L'engagement de caution apparaît lui-même inadapté aux capacités financières de la caution.

Il convient de préciser que selon la jurisprudence, cette obligation de mise en garde n’est due qu’en présence de cautions non-averties (c’est-à-dire novices) mais que ces dernières soient des personnes physiques ou des personne morales.

Ainsi, à l’inverse, une caution avertie (c’est-à-dire dont ses connaissances, du fait de son activité notamment, font présumer qu’elle est en mesure de mesurer les risques attachés à son engagement de caution), ne pourra se prévaloir d’un éventuel manquement de la banque à son obligation de conseil.

Engagements de caution consentis à partir du 1er janvier 2022

L'article 2299 du Code civil prévoit désormais que :

« Le créancier professionnel est tenu de mettre en garde la caution personne physique lorsque l'engagement du débiteur principal est inadapté aux capacités financières de ce dernier. A défaut, le créancier est déchu de son droit contre la caution à hauteur du préjudice subi par celle-ci. »

En revanche, il est à noter des évolutions dans le régime et la mise en œuvre de ce devoir de mise en garde en comparaison avec celui né de la jurisprudence de la Cour de cassation.

En premier lieu, alors que le devoir de mise en garde était dû par le créancier professionnel si l’engagement du débiteur principal ou celui de la caution était inadapté à leurs capacités financières respectives, l’article 2299 du Code civil ne prévoit de devoir de mise en garde que dans l’hypothèse où l’engagement du débiteur principal est inadapté.

Il n’est donc plus possible (sous réserve de la jurisprudence à intervenir) pour une caution de se prévaloir d’une absence de mise en garde par le créancier professionnel que son engagement serait inadapté à ses propres capacités financières.

[Cette limite est toutefois à tempérer par l’article 2300 du Code civil qui prévoit que si le cautionnement souscrit par une personne physique envers un créancier professionnel était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné aux revenus et au patrimoine de la caution, il est réduit au montant à hauteur duquel elle pouvait s'engager à cette date.]

Par ailleurs, alors que la solution jurisprudentielle décrite valait pour les cautions personnes physiques et personnes morales, l’article 2299 ne vaut que pour les personnes physiques.

En revanche, alors que la jurisprudence ne prévoyait un devoir de mise en garde qu’au bénéfice des cautions « non-averties », l’article 2299 du Code civil ne limite pas ses dispositions à ces dernières.

Ainsi, peuvent également s'en prévaloir les personnes « averties ».

Comment est sanctionné le manquement de la banque à son obligation de mise en garde ?

L’article 2299 du Code civil prévoit que : « le créancier est déchu de son droit contre la caution à hauteur du préjudice subi par celle-ci. »

Selon la jurisprudence de la Cour de cassation, le préjudice subi par la caution se définit comme la chance perdue par cette dernière de ne pas consentir l’engagement de caution.

Se pose dès lors la question de l’évaluation de cette perte de chance.

En premier lieu, dans la mesure où le préjudice correspond à une perte de chance, il ne peut être admis que ce préjudice soit égal à la totalité des sommes dues par la caution.

A l'inverse, il est également impossible de considérer la perte de chance comme nulle et donc d’estimer le préjudice comme étant lui aussi nul.

Il appartient donc au juge du fond d’apprécier la perte de chance, son appréciation étant encadrée par les deux limites susvisées.

Pour évaluer le préjudice, le juge doit s’interroger le pourcentage de chance que la caution ne se soit pas engagée si elle avait été mise en garde par le créancier.

Pour répondre à cette question, les juges peuvent se fonder sur plusieurs critères dont notamment les suivants :

  • La capacité de paiement de la caution (l’importance des sommes qu’elle s’est engagée à garantir au regard de l’importance de son patrimoine et de sa situation personnelle) ;
  • Le risque de défaillance du débiteur principal ;
  • La possibilité ou non que l’engagement principal puisse exister sans le cautionnement ;
  • L'existence de garanties alternatives (garantie à première demande…) ;
  • L’intérêt personnel de la caution dans l’engagement garanti.

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